Derniers regards avant disparition
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Le cheminement de Marie-Hélène Labat s’apparente à un processus de macération.Elle utilise d’abord une matière brute initiale issue d’un travail de documentation sur des programmes de renouvellement urbain dans plusieurs quartiers en Normandie. Elle photographie méthodiquement le moment d’avant la démolition, le temps de la destruction et le vide laissé.En parallèle, et dans une certaine urgence, parce qu’elle n’était pas toujours autorisée à le faire, elle entre dans les appartements inoccupés et elle photographie les bribes de vies abandonnées, les traces laissées par les résidents. Marie-Hélène y collecte notamment les restes de papiers peints jusqu’à l’obsession, parce que, dit-elle « Ils offrent à voir les aspirations et les rêves des habitants. »Elle constitue ainsi une archéologie des lieux.À cette archéologie, elle intègre des hommes et des femmes qu’elle avait photographiés en d’autres circonstances « Ici, il y avait des gens » précise-t-elle.Enfin elle transforme, transmute, pourrait-on dire, cette matière en y intégrant parfois des éléments d’un travail plus intime qu’elle a appelé « adopter un arbre ».C’est ainsi que Marie-Hélène Labat opère une alchimie poétique donnant naissance à une écriture photographique singulière, une anthropologie onirique urbaine.Elle nous transporte dans un voyage qui questionne profondément la place de l’humain dans ces processus de transformations urbaines. Des déconstructions/reconstructions qui se décident loin de ceux qui en sont les bénéficiaires obligés.Mais plus encore avec ces incrustations d’arbres adoptés, ne serait-ce pas, la place, la responsabilité de l’Homme qu’elle interpelle.